Républicains du Sénégal, indignez-vous ! (Par Pape Mahawa Diouf)

0 50
La situation est inédite, dramatique et parfois un peu burlesque. En quelques années et sans crier gare, nous avons vu s’installer autour de nous des régimes putschistes militaires avec en bandoulière un discours démagogue, prétendument anti-impérialiste et anti-français primaire. Au lendemain des indépendances, différents pays fraîchement issus de l’Afrique Occidentale Francophone (AOF) se sont jetés dans le concert mondial des nations, plein d’espoir de sortir des ténèbres de la colonisation et de l’esclavage. Au Mali, l’expérience donne lieu à une série de coup d’état. Au Président Modibo Keita, premier Président du nouvel État indépendant succède le premier « coup » de Moussa Traoré, plus tard Amadou Toumani Touré mettra fin au régime du général Traoré. Après l’intermède Alpha Omar Konaré, ce sera le retour démocratique de ATT qui lui même subira le « coup » du capitaine Sanogo. Puis survient en 2019 le « putsch » de Assimi Goita contre IBK en 2020. Il faut rajouter à cela la césure d’une partie du territoire national par les mouvements terroristes islamistes du Sahel. 
 
 Au Burkina Faso, l’expérience n’est guère différente. Le pays ne connaîtra pas de régime démocratique avant le 30 novembre 2015 et l’accession à la présidence de Roch Marc Christian Kaboré. Celle-ci est courte, puisque interrompue par deux coups d’État militaires successifs qui conduisent à installer le capitaine Ibrahima Traoré au pouvoir. Il en va ainsi au pays des « hommes intègres », puisque même le très sympathique personnage historique Thomas Sankara dirigeait un régime militaire liberticide. Déposé puis assassiné, c’est Blaise Compaoré qui va diriger le pays jusqu’en 2015. Lui aussi victime à son tour d’un coup d’état militaire par le Général Diendere. En Guinée, le Président Ahmad Séckou Touré tente dès 1958 l’indépendance dans la rupture. Longue expérience de développement endogène sanctionné par un échec regrettable. Il s’en suit une série de régimes militaires. On se souvient alors du spectacle surréaliste offert à la face du monde par un capitaine de l’armée guinéenne du nom de Moussa Dadis Camara. Avec une violence inouïe, les troupes du capitaine avaient choqué l’opinion publique internationale. 
 
L’expérience de la démocratie va tourner court dans ce pays frère. La chaotique tentative d’un troisième mandat du président Condé va boucher tous les horizons, avant qu’une fois de plus un coup d’Etat militaire vienne mettre un coup d’arrêt au processus démocratique. Ceux sont ces modèles là que les apprentis sorciers de chez nous veulent ériger en exemple. Franchement, ce n’est pas très sérieux! Tous les patriotes de ce pays doivent à l’unisson dénoncer ces « coup d’État », liberticides illégitimes qui se font contre le peuple. En 63 ans d’indépendance notre pays a adopté le multipartisme, implémenté le pluralisme médiatique et fait l’expérience d’une société civile forte dynamique. Les pères fondateurs de notre Nation ( Leopold S Senghor, Mamadou Dia, Lamine Gueye, Blaise Diagne, Cheikh Anta DIOP, Abdoulaye Wade, Abdou Diouf et tant d’autres) ont bâti les fondements d’une citoyenneté émancipée, fondamentalement panafricaine et ouverte sur le monde. Une démocratie et un projet national forts qui transcendent les clivages ethniques et religieux si prompts à fractionner les nations. Ainsi, le Sénégal reste et demeure ce modèle de démocratie et de nation résiliente, d’une société encore profondément humaniste et ouverte sur l’universel. 
 
Indiscutablement, le Sénégal n’est pas un pays en proie au doute, crispé et replié sur lui-même. Dès lors, comment ne pas s’indigner d’entendre des citoyens sénégalais défendre des régimes putschistes chez des peuples frères?! Veulent-ils la même chose pour le Sénégal? La défense par des compatriotes de ces régimes militaires antidémocratiques est à la fois choquante et inacceptable. Nous devons donc tous nous dresser contre les forces qui cherchent à installer des régimes militaires à la place des choix légitimes de nos peuples dans notre sous-région. Au Niger c’est un pouvoir élu par le peuple nigérien qui a été attaqué et son Président pris en otage. Il est du devoir de tout démocrate et patriote africain de refuser ces discours démagogues qui cherchent à légitimer l’inacceptable: l’installation de la loi du plus fort dans notre sous-région. C’est pourquoi, autant nous nous devons d’encourager nos états de la zone CEDEAO à privilégier la voie diplomatique, autant nous devons être intransigeants quand à l’absolue nécessité d’un retour de l’ordre constitutionnel au Niger mais également dans tous les autres pays de la CEDEAO où règnent des régimes militaires illégitimes. 
Pape Mahawa DIOUF
Leave A Reply

Your email address will not be published.